article de l'ardennais sur le procès thomé génot

Publié le par rey charles



NOUZONVILLE/Procès Thomé-Génot

Le maximum  requis  contre les patrons voyous

Madeleine Simoncello, le procureur général, est venue prendre la température avant l'audience.

Cinq ans de prison : le parquet a requis hier à Reims la peine maximale contre Greg Willis et Catherine Zickfeld, les ex-dirigeants US de Thomé-Génot.

Le délibéré sera rendu le mardi 8 septembre. « Jour de la fête de la Nativité » a relevé le président Craighero, un brin pince-sans-rire, comme pour conclure une audience souvent chargée d'émotion (au moins dans la sémantique) sur une note d'espérance et d'humanité.

On saura en tout cas à cette date si le tribunal correctionnel de Reims aura suivi le parquet, qui a réclamé hier la peine maximale à l'encontre de Greg Willis et Catherine Zickfeld, l'ex-PDG de Thomé-Génot et son adjointe, repartis aux Etats-Unis juste avant la liquidation de l'entreprise de Nouzonville, en octobre 2006, qui laissa plus de 300 salariés sur le carreau.

En présence d'une poignée d'anciens salariés et de quelques élus, le procès « bouclé » en moins de deux heures s'est donc achevé sur des réquisitions particulièrement sévères qui ont satisfait pleinement les parties civiles.

C'était presque la moindre des choses puisque « les patrons voyous », poursuivis pour « abus de biens sociaux, recel et banqueroute par détournement », on le savait d'avance, n'étaient pas là. Et pour cause, puisque leur adresse reste inconnue de la justice française…

« Malfaiteurs en attaché-case »

« Leur absence est une gifle » s'est au demeurant indignée le substitut Frédérique Dalle. « Ils n'ont pas répondu aux convocations » a-t-elle regretté, ce qui aurait pu sembler paradoxal si la voix du ministère public n'avait pas mis le doigt, volontairement ou non, sur l'un des paradoxes du dossier. « M. Willis et Mme Zickfeld étaient forcément au courant (de la procédure) via le conseil parisien de la société Catalina… »

Oui mais voilà : ce n'est pas le groupe américain Catalina en tant que personne morale qui était poursuivi, mais ses deux représentants, en tant que personnes physiques. Lesquelles ont disparu depuis de l'organigramme de la société basée en Californie, qui avait fait main basse à l'automne 2004 sur l'entreprise ardennaise…

Toujours est-il que si l'absence de « ces délinquants en col blanc mais aux méthodes de voyous » (dixit le substitut Dalle), de ces « malfaiteurs en attaché-case » (dixit l'avocat des salariés Xavier Médeau) a évidemment pesé, les débats (à charge, forcément) ont été utiles.

Moins pour ce qui est d'en savoir plus encore sur les délits accumulés en moins de deux ans,
que sur les conditions dans lesquelles le groupe US fut autorisé à reprendre l'un des fleurons de la sous-traitance automobile hexagonale (Thomé-Génot était encore en 2004 le leader mondial de pôles d'alternateurs). Voire sur la lenteur avec laquelle « les institutionnels » (selon le terme de Me Médeau, encore), ont réagi (au demeurant quand la liquidation devint inéluctable, alors que dès 2005, des alertes avaient été déclenchées), dans ce qui relevait d'une chronique d'un naufrage annoncé car sciemment organisé.

Les faits incriminés, en effet, étaient connus. Le travail des enquêteurs du SRPJ a démonté le mécanisme d'une véritable vampirisation à coups de factures astronomiques de frais de management et de consulting imaginaires, d'actifs immobiliers bradés, d'investissements outre-Atlantique dans une société basée dans l'état du Delaware (où la transparence comptable et fiscale est à peu près comparable à celle des Iles Caïmans), de détournement d'avances du client principal (Ford), et enfin de vente à perte ! Bref, la panoplie parfaite de toutes les ficelles (plus ou moins grosses) pour pomper et détourner le maximum de trésorerie au seul profit du groupe américain.

Lequel, avec ces millions, a pu poursuivre son développement et installer une usine au Mexique. Car c'est aussi le savoir-faire ardennais qui a été pillé.
« La peine prononcée aura valeur de réparation symbolique » a admis l'avocat des salariés. Sur ce point, il a été entendu par le parquet.

Et on imagine mal qu'il ne le soit pas par le tribunal…

Philippe MELLET

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