Article de l'Ardennais " Les archives de Thomé Génot en sécurité"
Histoire d'un sauvetage…
Publié le dimanche 14 février 2010 à 11H00
Actes notariés, bilans comptables, registres en tous genres : Violette Rouchy-Lévy et ses collaborateurs auront bien du travail une fois que les archives de Thomé-Génot quitteront leur local de « quarantaine »…
Pour l'heure, la cinquantaine de caisses a été placée en « quarantaine », dans un local ad hoc des Archives départementales, à Mézières.
« Les différents documents ont été soumis à rude épreuve dans un bâtiment ouvert aux quatre vents et qui a été incendié partiellement plusieurs fois : l'humidité, le gel, d'éventuelles moisissures… Il convient donc de les stocker isolément quelque temps pour éviter toute contamination (ce qui aurait des conséquences dramatiques pour les autres collections). Ensuite, on pourra commencer à effectuer des premiers tris. »
Violette Rouchy-Lévy, directrice des Archives départementales, ne cache pas un certain soulagement. Après moult péripéties, une grande partie des archives de l'emblématique société Thomé-Génot de Nouzonville a pu être sauvée.
Cela n'a pas été une mince affaire. Et a même fini par ressembler à un feuilleton rocambolesque… et acrobatique !
Résumé des faits : « Quatre courriers ont été adressés au liquidateur, Me François Brucelle, en juin et juillet 2007, en février 2008 puis en février 2009. Toutes lettres demeurées sans réponse. A l'automne, nous avons alors pris contact avec le tribunal de commerce pour qu'il intervienne à son tour. C'est ainsi qu'un rendez-vous a enfin été pris le mardi 9 février dernier avec Me Brucelle. Le jour même de l'incendie qui a touché une partie du bâtiment administratif de l'entreprise ! Du coup, j'ai décidé de précipiter le mouvement » explique Violette Rouchy-Lévy.
Avec deux agents des Archives, la directrice s'est rendue sur les lieux et a pu ainsi « sauver » en deux jours tout ce qu'elle pouvait. Dans des conditions parfois peu orthodoxes.
Plus d'un siècle d'histoire
Des documents comptables dans le grenier, une salle du premier étage dont le sol était couvert de dossiers en tous genres (le contenu des armoires avait tout simplement été jeté par terre), même un cagibi rempli d'autres archives ont été évacués par les fonctionnaires. « Sur place, dans la précipitation, il était impossible de trier… » note encore la directrice.
Quelques « sondages » permettent cependant de mesurer que c'est un trésor, véritable pan de la mémoire industrielle et ouvrière des Ardennes, qui a ainsi été préservé de l'oubli… et de la coupable négligence du liquidateur. « Livres de paie, notices techniques, actes notariés, comptes rendus de comités d'entreprise… Nous avons plus d'un siècle d'histoire à reconstituer… » Et encore ce fonds demeure-t-il partiel.
Me Brucelle a ainsi fini par se souvenir que des documents (liés à la sécurité et à l'environnement) avaient été confiés à une société spécialisée. Par ailleurs, on ne saura jamais ce que sont devenus les papiers que des salariés avaient découverts, effarés, le jour de la vente aux enchères des machines en janvier 2009… Enfin, nul doute que les anciens propriétaires (avant l'arrivée des Américains qui précipitèrent Thomé-Génot vers la liquidation, en octobre 2006), la famille Dury, possèdent aussi des documents de premier ordre. Toujours est-il que les historiens et les anciens salariés peuvent être rassurés. L'obstination de la directrice des Archives départementales a fini par payer. Même s'il lui a fallu grimper sur une échelle et franchir des gravats pour mener à bien sa mission…
Philippe MELLET